Responsable : Julien Blanc
L’ethnoécologie étudie les savoirs et savoir-faire écologiques d’une société. La notion d’écologie renvoie à celles d’habitat et de relation. Ce qui est étudié, à partir d’approches ethnographiques, sont ces interactions cognitives, sensibles et pratiques entre les groupes humains et leur environnement, dans le contemporain (les approches diachroniques sont cependant usitées). Il s’agit d’aborder l’écologie — l’organisation du monde et ses relations internes — en tant qu’expérience vécue.
Cet environnement peut être pensé et pratiqué comme objet et sujet, façonné par les interactions sociales de collectifs associant humains et non-humains, être objet et enjeu de valeurs, de pouvoirs, de droits et de savoirs, sources d'engagements ou de réactions, support d’appropriation ou d’exploitation… La connaissance environnementale produite est ici un outil performatif qui permet d’interroger des thèmes et des problématiques directement liés aux paradigmes de la durabilité ainsi qu’aux politiques et modèles à l’œuvre dans le processus de mondialisation et de globalisation. Ces environnements sont, dans nos recherches, urbains ou ruraux, forestiers, maritimes, pastoraux ou désertiques et les groupes sociaux étudiés peuvent être tant une communauté rurale qu’un collectif de gestionnaires gouvernementaux. Les recherches se déploient sur une grande diversité de terrains en Afrique (australe, centrale, de l’Ouest et Maghreb), au Proche-Orient, en Amérique du Sud et centrale, en Asie du Sud-Est et en Europe, dont la France métropolitaine et ses collectivités ultra-marines.
Les travaux de cette équipe s’inscrivent dans plusieurs champs disciplinaires : anthropologie sociale, anthropologie du droit, ethnobiologie, ethnoécologie, histoire environnementale, sociologie, sociologie des sciences, géographie. Ils s’appuient sur le riche héritage du Muséum en ethnosciences et ethnobiologie et entendent, tout en s’inscrivant dans la filiation de ces recherches, en renouveler les approches. Son ambition est de construire un espace commun de réflexion défini par trois démarches originales (cf. axes, ci-dessous) chacune alimentée par l’ensemble des travaux de ses membres.
La préservation de la diversité biologique, tant pour sa valeur intrinsèque que pour sa valeur extrinsèque, reflète une prise de conscience sociale et politique de la fragilité des écosystèmes. La consolidation de cette préoccupation ces dernières décennies conduit à nous intéresser aux modes de pensée et d’action qui président à la conservation. La conservation de la nature et ses acteurs (promoteurs, agents et populations) sont, ici, abordés comme objets d’étude à part entière. En cela, cet axe tend à développer une démarche en ethnoécologie qui se veut complémentaire à la démarche de biologie de la conservation.
À partir d’approches en ethnologie, en anthropologie de l’environnement déjà inscrites au sein de l’équipe et d’une approche émergente en anthropologie du droit (sur les normes de comportement), l’analyse porte sur les processus et interactions sociales que la conservation suscite et sur leurs conséquences pour les groupes humains impliqués. Elle vise à décrypter le comportement social adopté ou recherché par les acteurs de la conservation. L’objectif est d’élaborer une grille de lecture critique des propositions de conservation. Cette perspective offre l’opportunité d’étudier les éthiques environnementales, les représentations sociales de la conservation et les droits mobilisés. Elle renseigne sur les visions du monde ou les ontologies en jeu et sur les rapports de pouvoirs à l’œuvre lorsqu’il s’agit de défendre ou d’imposer des modèles de conservation de la biodiversité, voire de société.
Au sein de l’ethnoécologie, l’ambition est ici d’étudier la variété des interactions sensorielles que l’Homme en société peut tisser avec son environnement. Ces relations avec son milieu naturel et surnaturel sont largement structurées par l’usage qu’il a appris à faire et fait de ses sens. Savoirs et pratiques sensoriels sont façonnés par l’expérience psychique et sociale et constituent un mode de connaissance. L’étude des perceptions sensorielles et de leurs apprentissages est un enjeu central de la compréhension des processus cognitifs mis en œuvre.
Malgré un équipement sensoriel a priori commun à tous les représentants de l’espèce Homo sapiens, coexistent des façons d’être au monde d’une extraordinaire hétérogénéité du fait d’apprentissages sensoriels culturellement situés. Nos objets d’études portent sur les sensibilités, les balances et les combinaisons sensorielles privilégiées par le groupe social. Nous appréhendons ces univers sensoriels (sensorium) aussi bien d’un point de vue de la science (etic) que dans la perspective de ses interlocuteurs (emic) sur nos divers terrains de recherche ethnographiques.
Les savoirs et les pratiques relatifs à l’environnement et au vivant sont façonnés et coproduits par les individus et leurs groupes. La mobilisation de ressources naturelles implique la mobilisation dans le même temps de ces savoirs et pratiques : les unes s’articulent aux autres. L’enjeu est ici de proposer une ethnoécologie qui se concentre sur ces articulations.
Évoluent et peuvent coexister, d’une part, plusieurs registres de savoirs et pratiques environnementaux, d’autre part, différents usages voire acceptions de « ressource naturelle ». Ces dynamiques résultent des évolutions propres à chaque groupe social mais aussi de la mise en relation, historiquement et socialement située, de différentes normativités et rationalités. La mondialisation induit une accélération de cette dynamique et participe en cela à une ouverture croissante des écologies des uns à celles des autres, voire à l’émergence de nouvelles.
Sur nos terrains de recherche, un premier objectif est d’identifier ces écologies différenciées — ces manières d’habiter le monde — et d’analyser l’articulation des registres mobilisés (de l’environnement, des pratiques et des savoirs). Il s’agit aussi de rendre compte de leur possible coexistence et de leur mobilisation par les acteurs locaux (tant au niveau individuel que collectif) ainsi que de documenter les processus d’émergences, entre luttes, séductions, ruses, résistances et partages.
Interactions avec les autres équipes
Au travers des travaux et des réflexions menés au sein de l’axe 1, des liens sont renforcés ou noués avec les équipes IPE et DivEC. Pour l’axe 2, ils s’organisent avec les équipes DivEC, IPE et AGène. Enfin l’axe 3 se nourrit des collaborations avec les équipes AGène et éventuellement IPE.
Enseignement
Notre équipe est très investie dans l’enseignement. Certains de ses membres (J. Blanc, N. Césard, R. Dumez) assument la responsabilité des première et deuxième années de la spécialité Environnement : dynamiques des territoires et des sociétés (M1 et M2 EDTS), de leurs parcours Anthropologie de l’environnement et de nombre de leurs unités d’enseignement. Nous participons aux enseignements du Tronc commun du Master du MNHN Évolution, patrimoine naturel, sociétés (N. Belaidi, R. Dumez). R. Dumez est responsable pour le MNHN du 3e semestre de l’Erasmus Mundus Joint Master Degree Dynamics of Cultural Landscapes and Heritage Management (EMJMD DYCLAM, porté par l’Université Jean Monnet Saint-Étienne, UJM) et d’un module au sein de mineure transdisciplinaire thématique Patrimoine, sociétés, relations Nord-Sud (PSRNS) de Licence (Sorbonne Universités-UMPC-MNHN-IRD). Nadia Belaïdi est responsable de l’UE Droit et politique(s) de l’environnement (M2 Espace Rural et Environnement, Université de Bourgogne). Enfin, nous développons des enseignements dans d’autres établissements universitaires sur les thématiques du droit de l’environnement, des interactions sociétés-nature, de l’anthropologie du corps et de la santé (Science po Lille, Paris Sorbonne Abu Dhabi, UJM, Universités Paris 1, Paris 5, Paris 6, Paris 7 et Paris 13, Université Henri Poincaré Nancy).
Chercheurs et enseignants-chercheurs :
BATTESTI Vincent (CR CNRS, HDR)
BLANC Julien (MC MNHN)
CÉSARD Nicolas (MC MNHN)
DUMEZ Richard (MC MNHN)
EPELBOIN Alain (CR CNRS)
IVANOFF Jacques (CR CNRS, HDR)
MARIANI Léo (MC MNHN, HDR)
RAYMOND Richard (CR CNRS)
ROUÉ Marie (DR émérite CNRS)
RUHLMANN Sandrine (CR CNRS)
Chercheurs et enseignants-chercheurs en second rattachement :
BAHUCHET Serge (PR MNHN) (équipe DivEC)
BELAÏDI Nadia (CR CNRS, HDR) (équipe DivEC)
DOMINIGUEZ Pablo (CR, CNRS) (équipe DivEC)
NARAT Victor (CR CNRS) (équipe IPE)
PENNEC Flora (IE CNRS) (pôle Interdisciplinarité)
SIMMEN Bruno (CR CNRS) (équipe IPE)
Chercheurs CDD :
CHAMEL Jean (contractuel)
RENAULT Gaspard
RÉVELIN Florence (contractuelle)
Attachés honoraires :
AUBAILE Françoise
COIFFIER Christian
FOURNIER Dominique
LUXEREAU Anne
MONTIGNY Anie
Correspondants :
LIZET Bernadette
WAHICHE Jean-Dominique
Doctorants :
BRIHIEZ Joseph
BELLACHE Doria
MARTY Léo
ROSER Tania
TASTET Céline
Chercheurs associés :
BESSY Anouk
BIVILLE Quentin
DELAVIGNE Anne-Élène
DUPÉ Sandrine
GARINEAUD Clément
LAVAL Pauline
MEILLEUR Brien Adrien
MOBAIED Samira
SCAPINO Julie
TEKAYAK Deniz
Collaborateurs :
GUERRY BURGOS Ariadna
DELAMOUR Carole
DUDA Romain
GALLOIS Sandrine
REYES Nastassia